Balade dans les îles Éparses
Publié le 1 déc. 2021Bruno Marie
Éparpillées dans le Canal du Mozambique et l’océan Indien, les îles Éparses sont de minuscules territoires français inhabités. Entre 2012 et 2015, le photographe Bruno Marie a accompagné plusieurs expéditions scientifiques d’étude de la biodiversité de ces îles isolées. A travers ces images, il nous emmène avec lui explorer ces territoires préservés.
« Ces deux raies pastenagues nagent dans les eaux claires du lagon de la Grande Glorieuse. Le sable blanc y est extrêmement fin. Le cœur de l’île est principalement composé d’une très belle cocoteraie qui cache un étang d’eau saumâtre où l’on prévient le (rare) visiteur, par un panneau à tête de mort, des risques liés aux sables mouvants qui s’y trouveraient. »
« Ces récifs fossiles sur les plages de la Grande Glorieuse sont les témoins d’une époque – il y a plus de 100 000 ans – où la mer atteignait environ six mètres de plus que son niveau actuel. Ces vestiges coralliens de plusieurs mètres de haut apparaissent comme des montagnes sur ces îles où le point culminant ne s’élève que de quelques mètres. »
« Construite en blocs de corail taillé, la maison Paturau est l’un des vestiges de l’occupation éphémère de l’île Juan de Nova pour l’exploitation du guano et de la roche phosphatée au cours du 20e siècle. C’est en réalité Edouard Lanier, prédécesseur d’Hector Paturau à la propriété de la concession, qui la fit construire. Sur une pierre de soubassement, l’inscription latine Labor improbus omnia vincit datée du 29 juillet 1911 promet qu’« un travail acharné vient à bout de tout ». Cette belle demeure n’était cependant pas destinée aux ouvriers, qui vivaient dans des conditions difficiles. »
« L’île d’Europa est l’un des plus importants sites de ponte de l’océan Indien pour les tortues marines. Après être montée en haut de la plage, cette femelle Tortue verte (Chelonia mydas) creuse un nid de quelques dizaines de centimètres de profondeur, dans lequel elle pondra une centaine d’œufs.
La ponte d’une tortue est une scène émouvante : elle peine beaucoup à se mouvoir au milieu de la végétation, des débris coralliens et des pierres qui jonchent les plages, sans compter le dénivelé. Se déplaçant à la force des nageoires, bien peu adaptées en milieu terrestre, certaines d’entre elles restent bloquées. Il est à Europa un lieu baptisé « le cimetière des tortues », une grande étendue de sable où nous avons vu nombre de carcasses de tortues n’ayant pu faire l'aller-retour du voyage qu’elles avaient entrepris pour donner la vie.»
« Certains secteurs d'Europa, notamment les épaves, grouillent de ce bernard-l’hermite (Coenobita perlatus), en particulier à la tombée du jour. Par son régime alimentaire principalement détritivore, ce crustacé est un véritable agent d’entretien des plages ! »
« La sansouïre est un écosystème de zone humide qui se développe sur les plaines autour du lagon d’Europa, composé d’une végétation adaptée au milieu salin avec notamment des salicornes (Caroxylon littorale). »
« Originaire de Madagascar et des îles voisines, l’Araignée néphile dorée (Trichonephila inaurata) doit son nom à ses fils de soie de couleur dorée. Présente également à La Réunion, elle y est appelée localement « Bibe ». Malgré sa taille impressionnante (10 cm d’envergure), elle est inoffensive. »
« Europa abrite une sous-espèce endémique du Phaéton à bec jaune (Phaethon lepturus europae). Cet oiseau est communément appelé Paille-en-queue en raison de ses deux longues plumes rectrices. Sa population à Europa ne compte que quelques centaines de couples et il niche surtout dans la forêt sèche. L’île recense également plus d’un millier de couples de Paille-en-queue à brins rouges (Phaethon rubricauda), soit l’une des plus grandes populations de l’ensemble de l’océan Indien. »
« Le Scinque aux yeux de serpent d'Europa (Cryptoblepharus bitaeniatus) est un reptile terrestre endémique, diurne, qui mesure entre 8 et 10 cm à l’âge adulte. Préalablement considéré comme une sous espèce du Scinque de Bouton (Cryptoblepharus boutonii) présent à La Réunion et Mayotte, il a récemment été élevé au rang d’espèce à part entière, témoignant de la constante évolution de la taxonomie (science de classification du vivant). »
« Ce petit passereau caché dans les broussailles est un Zostérops de Madagascar, aussi appelé oiseau-lunette. Il se trouve surtout dans les zones boisées et les mangroves. Le naturaliste allemand Alfred Voeltzkow décrivit en 1904 cette sous-espèce endémique d’Europa, qui sera nommée Zosterops maderaspatanus voeltzkowi. »
« Tromelin abrite une importante population de Fou à pied rouge (Sula sula). On observe deux types de plumage chez l’adulte : soit blanc avec l’extrémité des plumes noires, soit entièrement brun, comme celui-ci. Le duvet du poussin est quant à lui d’un blanc immaculé. Le jeune peut rester plusieurs mois au nid avant de pouvoir voler. »
« Ce canon est l’un des vestiges de l’Utile, navire qui fit naufrage à Tromelin en 1761. L’équipage construisit un radeau pour quitter l’île, y abandonnant 80 esclaves que le navire convoyait illégalement. Les « oubliés de Tromelin » resteront 15 ans sur l’île. Les derniers survivants, 7 femmes et un enfant, ne seront secourus qu’en 1776 par Jacques Marie de Tromelin.
Au second plan on aperçoit le drapeau des Terres australes et antarctique françaises sous le drapeau français, les îles Éparses étant l’un des 5 districts représentés par les étoiles autour des lettres TAAF entremêlées.»
Textes extraits pour partie du livre « Escales au bout du monde » sur les TAAF © Océindia (oceindia@icloud.com), S. Légeron, B. Marie, 2015. Plus de photos des TAAF sur le site web de Bruno Marie : http://seaview.photodeck.com/
Pour en savoir plus, découvrez la page portrait sur les îles Éparses.